Balai revenu

Mettre de l'ordre conduit à s'exposer à des trouvailles. Tout en cherchant à limiter le rangement, je divague inévitablement. Un souvenir en entraîne un autre, lequel me retient.
Avantage des jours fériés. Temps libre pour le tri d'images accumulées. Je m'astreins à mettre à la poubelle pour libérer de la mémoire. Irai-je jusqu'à payer un supplément, pour cause de saturation ? Bien sûr que non.


Je supprime les barbantes, hésite sur les péteuses, traîne devant mes pots de confitures, rêve de l'infini et me perds, quai Branly, dans des imbroglios de lettres.
Fort craintifs à l'idée de les écrabouiller, tandis qu'elles défilent sous un faisceau lumineux, voilà mes pieds plus assurés au soleil du vieux port marseillais. Tu lèves la caboche de ton ombrelle. C'est plus simple que de la baisser.
Saisir ainsi sur le toit d'un petit monde les ombres fugaces d'un instant T et se croire éternité.

Et dans la transparence qui se farde en rouillé, aux heures où le facteur Cheval a quitté sa brouette, et sa bicyclette tout autant, d'autres lettres retiennent sur lesquelles s'appuyer, cette fois-ci.

Le siège étant interdit, je n'en garde donc que le dossier. C'est cela ranger, en toute fausse et astreignante liberté.
Se dessine, en retrait du Palais idéal, un parterre qui renvoie à la condition d'être debout. L'oiseau bleu s'y égaie. Délicatesse, jusque dans les ombres arborées. Oeuvre d'un trisomique. Il scotche et il cartonne en me parlant, avec un accent qui semble belge.

Bécassine, en perte de lunettes, tu t'étais évaporée quelques mois.
As-tu retrouvé le goût de balayer du regard, avec tes lourds sabots seyant à tes pieds fourbus?
Et qu'en est-il du plaisir de vider la corbeille aux souvenirs poussiéreux et frelatés ?